Une multitude de modifications physiques ou comportementales passe parfois inaperçue chez le cheval vieillissant, confondue avec une simple conséquence de l’âge. Le syndrome de Cushing, en particulier, se cache derrière ces changements insidieux dans de nombreux cas. Peu connu du grand public, il affecte en général les animaux de plus de quinze ans. Son évolution lente, souvent silencieuse, retarde la mise en place d’une prise en charge adaptée. Sa méconnaissance contribue à des troubles qui altèrent la qualité de vie équine et la relation de confiance entretenue avec l’entourage humain. Comment reconnaitre ce mal et le traiter ? Quelles sont les solutions naturelles à envisager ?
Syndrome de Cushing équin : définition et incidence chez les chevaux âgés
La pathologie, endocrinienne, touche une proportion non négligeable d’équidés, avec une fréquence marquée dans la population de poney et parmi les races rustiques. Les premiers signes, qui apparaissent de manière progressive, rendent difficile la suspicion d’un déséquilibre hormonal. On peut observer des différences physiques ou dans les comportements sans vite en comprendre la cause. L’affection se développe aussi en lien avec un dérèglement du système neuroendocrinien. Son expression clinique est associée au vieillissement de certaines structures cérébrales. L’animal atteint continu à être actif, une situation qui complique davantage l’identification précoce du problème. À ce stade, les modifications perçues sont attribuées à tort à l’usure naturelle liée à l’âge.
Les éleveurs et les cavaliers expérimentés remarquent par ailleurs des anomalies diffuses comme un changement de silhouette, une perte de vivacité ou un ralentissement général. Elles doivent être prises en compte, car elles indiquent souvent un trouble sous-jacent. La fréquence du cushing chez le cheval justifie une vigilance accrue, surtout dans les établissements qui accueillent des montures âgées en retraite ou en pension de longue durée. La prévalence du syndrome augmente également avec l’allongement de l’espérance de vie des équidés domestiques. Les progrès des soins vétérinaires et l’amélioration des pratiques alimentaires ont favorisé cette longévité. L’anticipation de la maladie aide à maintenir les animaux dans des conditions satisfaisantes, tout en réduisant le risque de complications graves. Une détection trop tardive cause des perturbations considérables du métabolisme qui affectent la musculature, le pelage, la résistance aux infections et la locomotion.
Les causes hormonales du Cushing : un dysfonctionnement pituitaire
Le mal provient d’un dérèglement de l’hypophyse, localisée à la base du cerveau. Elle orchestre la sécrétion de diverses hormones, dont l’ACTH (adrénocorticotrophine), impliquée dans cette affection. La structure pituitaire antérieure produit cette substance en excès, une situation qui entraîne une stimulation continue des glandes surrénales. Ces dernières libèrent ainsi une quantité anormalement élevée de cortisol qui perturbe de nombreux processus physiologiques. Le déséquilibre observé découle aussi d’une dégénérescence progressive des mélanotropes, qui deviennent hypertrophiées, puis envahissantes. Ce phénomène conduit à la formation d’un adénome bénin qui provoque une hyperstimulation hormonale constante. À ce stade, l’autorégulation du système endocrinien, qui ne fonctionne plus bien, cause une production excessive de médiateurs métaboliques, en particulier des glucocorticoïdes.
L’hydrocortisone agit par ailleurs sur le métabolisme glucidique, les protéines, la régulation de la température corporelle et le fonctionnement du mécanisme immunitaire. L’organisme entre dans un état de stress permanent, qui fragilise l’équilibre général de l’animal. Les muscles, le foie, le tissu conjonctif et la peau subissent les effets cumulatifs de cet hypercorticisme chronique. L’hypophyse affectée est de plus sensible aux stimulations dopaminergiques. Le déficit en dopamine observé chez les chevaux atteints du syndrome de Cushing favorise l’activité anarchique des cellules responsables de l’ACTH. La boucle de rétrocontrôle, censée limiter les excès, se retrouve ainsi inefficace.
Les signes cliniques les plus fréquents chez le cheval atteint
La mue devient inégale, parfois absente, et laisse place à un poil dense, long, marqué sur les membres et le dessous de l’abdomen. Ce phénomène, appelé hirsutisme, se manifeste même pendant les saisons chaudes, sans amélioration spontanée. La fonte musculaire est un autre signe révélateur. Elle touche en priorité la ligne du dessus, en réduisant la masse sur l’encolure, le dos ou la croupe. L’ossature est apparente malgré un appétit conservé, voire accentué, tandis que la graisse s’accumule de manière atypique. Les dépôts autour des yeux, sur la base de la queue ou au-dessus de la nuque, créent un contraste frappant entre atrophie des tissus et surcharges adipeuses localisées. La fourbure est par ailleurs une complication très redoutée. Les sabots présentent une sensibilité accrue, une chaleur anormale ou des déformations visibles, comme des anneaux irréguliers sur la paroi.
La monture peut exprimer une gêne en se couchant souvent ou en modifiant anormalement sa posture. Dans les cas avancés, la douleur limite les déplacements. La léthargie s’installe aussi sans facteur déclencheur précis. Le cheval montre moins d’entrain, se déplace avec lenteur et manifeste une récupération longue après l’effort. Cette fatigue se renforce par une sudation excessive, même au repos ou par temps frais.
Comment diagnostiquer précocement la maladie ?
Un dépistage du syndrome de Cushing équin effectué tôt accroît la probabilité d’un suivi efficace. L’observation clinique, quand elle s’appuie sur une attention rigoureuse aux moindres variations comportementales ou physiques, donne les premiers indices. Tout signe révélateur justifie une consultation. Le vétérinaire interroge l’historique général de l’animal, puis recherche des épisodes récurrents d’infection, des troubles locomoteurs atypiques ou des anomalies métaboliques antérieures. L’auscultation oriente vers certaines pistes, mais seule une exploration biologique affine la suspicion. Le dosage de l’ACTH, qui augmente de manière marquée chez un sujet atteint, est de plus une méthode privilégiée. Les valeurs, qui fluctuent en fonction des saisons, imposent le recueil d’urine ou de sang à des périodes définies pour garantir des résultats comparables. Le praticien choisit avec soin le moment adéquat et interprète les taux en tenant compte des changements physiologiques normaux. Les laboratoires spécialisés proposent également des tests dynamiques. L’administration de substances telles que la dexaméthasone aide à évaluer la réactivité de l’axe hormonal. Ce protocole, qui implique de nombreux prélèvements espacés dans le temps, requiert une logistique bien planifiée et une bonne coopération de la monture.
L’association entre les analyses cliniques et l’évolution des symptômes guide ensuite la démarche thérapeutique. Un seul examen isolé n’autorise pas toujours une conclusion fiable. Le suivi régulier est obligatoire, surtout pour les cas du syndrome de Cushing à expression lente ou intermittente. L’imagerie est par contre rare dans ce contexte, car les modifications au niveau de l’hypophyse sont difficiles à observer sur des équipements standards. Le recours à cette technologie n’est envisageable que si une tumeur ou un autre processus intracrânien paraît probable.
Les traitements classiques disponibles et leurs limites
Le soin médicamenteux cible en particulier la régulation de l’activité hormonale anormale. Le pergolide figure parmi les substances les plus prescrites pour corriger l’excès de stimulation hypophysaire. Ce dérivé de l’ergot de seigle agit sur les récepteurs dopaminergiques afin de freiner la production exagérée d’ACTH. Le produit est introduit à faible dose, avec une augmentation progressive sur de nombreux jours, pour éviter les intolérances. Les premiers ajustements du comportement ou du métabolisme se manifestent après quelques cycles hebdomadaires, mais une amélioration clinique complète requiert un suivi attentif. L’animal réagit aussi de manière variable à la molécule. Divers sujets tolèrent avec aisance la posologie recommandée, tandis que d’autres développent une sensibilité accrue. L’observation quotidienne des réactions et de l’appétit est obligatoire pour vite ajuster la prise. Une surveillance rigoureuse des paramètres hormonaux à intervalles réguliers accompagne l’usage prolongé du traitement.
Les effets secondaires se concentrent de leur côté sur l’appareil digestif. Une baisse de la consommation d’aliments, des signes d’inconfort ou des selles molles invitent à réévaluer le dosage. Certains chevaux connaissent de plus une fatigue transitoire dans les premières semaines. L’adaptation du protocole passe parfois par une réduction temporaire de la quantité administrée, avant une reprise plus progressive. La contrainte principale s’appuie quant à elle sur la durée, car le soin n’a pas vocation à corriger l’anomalie de manière définitive. Il vise à stabiliser les manifestations liées au déséquilibre des hormones. La constance dans l’administration quotidienne, associée à un encadrement vétérinaire attentif, en détermine la réussite. Le coût à long terme, combiné aux bilans de suivi, influence également les choix. D’autres molécules comme la bromocriptine, la cyproheptadine et la cabergoline ont par ailleurs été étudiées, mais leur efficacité est limitée comparées au pergolide. Ces alternatives peuvent être envisagées en cas d’intolérance au traitement de première intention, toujours sous la surveillance stricte d’un vétérinaire qualifié.
L’approche naturelle : rôle des plantes et compléments ciblés
Divers extraits végétaux favorisent une meilleure régulation des activités endocriniennes sans effets indésirables sur l’organisme. L’ortie préserve par exemple le métabolisme général et stimule avec douceur les fonctions d’élimination. Ses feuilles séchées s’intègrent dans la ration quotidienne sous forme de poudre ou d’infusion refroidie. La prêle, qui complète cet apport en consolidant les tissus conjonctifs, améliore la résistance de l’appareil locomoteur. Sa richesse en silice naturelle soutient les sabots et les articulations. L’usage ciblé du ginseng module par ailleurs différentes réponses hormonales, surtout si le cheval présente une baisse d’énergie persistante. Ce rhizome tonifie sans provoquer d’excitation excessive. Privilégier les préparations à faible concentration, distribuées de manière fractionnée, évite tout emballement du rythme biologique. La réglisse exerce également une action douce sur l’axe hypophyso-surrénalien. Sa teneur en glycyrrhizine requiert toutefois de la méticulosité en cas de terrain sensible à la rétention d’eau ou à l’hypertension.
L’ajout de suppléments riches en antioxydants, comme le curcuma et le thym, renforce de plus les défenses cellulaires. Ces plantes s’utilisent en complément d’un régime bien ajusté, sans substitution aux apports alimentaires. Leur efficacité s’évalue dans la durée, en tenant compte de la régularité de la prise et de l’évolution des symptômes. L’achat de produits de qualité supérieure, disponibles dans les commerces spécialisés, garantit des résultats durables et appréciables. Le pissenlit, la fumeterre, le chardon-Marie, l’orthosiphon, le radis noir et l’artichaut favorisent aussi la santé hépatique et rénale. Ils aident l’organisme à éliminer les toxines. La prêle, le chrysanthellum, l’ortie et le cassis apportent quant à eux des minéraux et des composés anti-inflammatoires naturels. Ils soutiennent la locomotion, souvent affectée par la maladie. La spiruline et le griffonia les complètent en fournissant des vitamines, des oligoéléments et des acides aminés essentiels au maintien de la vitalité générale.
Conseils pour adapter l’alimentation d’un cheval atteint de Cushing
La gestion rigoureuse de la consommation de sucre simple et d’amidon est une priorité. L’hypercortisolémie chronique participe au développement d’une résistance à l’insuline. Cette perturbation métabolique conduit à des épisodes de fourbure, complication redoutable du Cushing. La suppression des céréales traditionnelles comme l’avoine, l’orge et le maïs est également avantageuse. Ces aliments riches en glucides complexes provoquent des pics glycémiques considérables qui sollicitent de manière excessive le système insulinique déjà fragilisé. Les granulés commerciaux enrichis en mélasse doivent par ailleurs être évités, sauf en cas de perte d’état corporel qui requiert un apport énergétique supplémentaire. Le fourrage est de plus la base nutritive de la monture atteinte du syndrome. Un foin de bonne qualité, pauvre en matières sucrées et récolté au stade optimal, convient à la perfection. L’herbe fraîche, qui contient de grandes quantités de fructanes au printemps et en automne, est à diminuer, voire supprimer chez les chevaux qui présentent des dégradations podales.
L’ajout de vitamines soutient aussi les fonctions de détoxication naturelle. La E améliore par exemple la résistance cellulaire face aux dérèglements internes. Le sélénium organique la complète, à condition de connaître avec précision sa concentration dans l’alimentation globale. Les huiles riches en acides gras polyinsaturés comme celles de lin et de cameline apportent une source de lipides digestibles sans surcharge glucidique. Elles renforcent l’état corporel des animaux amaigris sans déclencher de réponse endocrinienne excessive. Un usage limité à quelques millilitres quotidiens évite une digestion trop rapide.
Comment prévenir les complications et accompagner le cheval sur le long terme ?
Un parage fréquent et approprié, associé à une ferrure thérapeutique, offre la possibilité de maintenir un équilibre podal optimal et de soulager les structures sensibles. Le suivi des pieds et la détection précoce des signes de sensibilité, telle que la démarche douloureuse, sont de bons réflexes. En cas de crise, une prise en charge vétérinaire immédiate contribue à minimiser les séquelles. Elle prévient la bascule de la troisième phalange causée par le syndrome de Cushing. Le renforcement du système immunitaire passe de plus par une hygiène rigoureuse et une surveillance accrue des infections. Le respect des protocoles de vaccination et de vermifugation à jour aide à adapter leur fréquence. Les soins dentaires réguliers favorisent une mastication efficace, requise pour l’assimilation des nutriments.
La tonte estivale améliore de manière considérable le confort thermique des chevaux hirsutes. Il permet une meilleure régulation de la température corporelle et réduit les risques de surchauffe. Un exercice adéquat garantit aussi le maintien de la condition physique et de l’équilibre métabolique, tout en préservant la masse musculaire. Les activités modérées et fréquentes comme la marche en main et le travail au pas monté évitent les efforts intenses susceptibles de déclencher un épisode de fourbure.